Sherbrooke

Gare du Canadien Pacifique (CP)

Description

La gare du CP est une gare ferroviaire construite de 1909 à 1910 et agrandie à plusieurs reprises par la suite. L’édifice allongé en brique, de plan rectangulaire à un étage, est coiffé d’un toit à croupes qui se prolonge en de larges avant-toits supportés par de grosses consoles. Le toit est percé de lucarnes à croupe dont certaines sont de grandes dimensions. La façade comporte un pavillon de deux étages légèrement excentré. Des annexes d’un étage et demi sont construites aux extrémités est et ouest du bâtiment initial. La gare du CP est implantée aux abords des rails de chemin de fer et en retrait de la voie publique, sur un terrain au relief peu accusé. Elle se situe à proximité d’un plan d’eau dans l’arrondissement du Mont-Bellevue de la ville de Sherbrooke.

Ce bien est cité immeuble patrimonial. La protection s’applique à l’enveloppe extérieure du bâtiment.

Valeur patrimoniale

La gare du CP présente un intérêt patrimonial pour sa valeur historique. Elle rappelle l’importance du chemin de fer dans le développement de la ville de Sherbrooke. Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, Sherbrooke devient le noeud d’un réseau de lignes ferroviaires qui connecte la région des Cantons-de-l’Est aux grands centres nord-américains. Ainsi, ces voies de communication ouvrent la ville aux marchés canadiens et américains. Cette situation révolutionne l’industrie et le commerce de la région. Sherbrooke s’impose alors comme capitale régionale. La compagnie du Canadien Pacifique (CP) accède à Sherbrooke à la fin des années 1880 avec l’achat de deux lignes, l’International Railway et la Waterloo and Magog Railway. Une gare ouverte en haute-ville en 1890 dessert déjà quelques manufactures. Une nouvelle gare est construite en 1909 et 1910 un peu plus au sud de la première pour mieux répondre aux besoins de la compagnie ferroviaire en expansion. Elle est accompagnée de différentes infrastructures, car le Canadien Pacifique décide de faire du site de Sherbrooke son point divisionnaire. Les entreprises s’implantent à proximité des infrastructures ferroviaires pour être bien reliées aux marchés du continent. Le secteur industriel de l’ouest de la ville prend de l’expansion. Des quartiers résidentiels sont aménagés autour de cette zone. Des commerces et des services s’implantent alors pour répondre à la nouvelle clientèle. Ainsi, la gare du CP représente au cours de la première moitié du XXe siècle un pôle de croissance pour le principal secteur industriel de Sherbrooke. Elle contribue aussi au renforcement du rôle de la ville comme centre régional. 

La gare du CP présente également un intérêt patrimonial pour sa valeur architecturale. Elle présente des formes architecturales caractéristiques des gares ferroviaires construites au début du XXe siècle. Les gares de cette époque comportent généralement un plan rectangulaire d’un étage coiffé d’un toit à croupes aux avant-toits débordants. Ces derniers sont supportés par de grandes consoles et servent à abriter les passagers des intempéries. Les gares du début du XXe siècle possèdent souvent un pavillon d’un étage et demi en façade. Tout en rassemblant ces éléments, la gare du CP se distingue des plans standards par des dimensions imposantes, la juxtaposition de différents volumes et un parement en brique. Ces caractéristiques s’expliquent notamment par la situation du bâtiment à Sherbrooke, centre régional et point de division majeur dans le réseau ferroviaire du CP. Ce modèle n’est toutefois pas unique; il est repris dans d’autres villes canadiennes occupant une position similaire dans le réseau ferroviaire. Par ailleurs, l’édifice montre une certaine influence de l’architecture domestique sur les édifices ferroviaires. Ainsi, la gare du CP rappelle le style Prairie, qui provient du Midwest américain et qui est diffusé au Québec au début du XXe siècle. L’édifice s’y rattache notamment par son profil bas et horizontal, son toit à quatre versants largement débordant et ses grandes lucarnes à croupe.

Éléments caractéristiques

Les éléments caractéristiques de la gare du CP de Sherbrooke liés à ses valeurs historique et architecturale comprennent, notamment :
– sa situation en bordure de la voie ferrée, en retrait de la voie publique, sur un terrain au relief peu accusé, dans le centre de la ville
– son volume, dont le plan rectangulaire allongé, l’élévation variant d’un à deux étages, le toit à croupes avec de larges avant-toits débordants
– les matériaux, dont le parement en brique, les fondations en pierre et les détails architecturaux et ornementaux en bois
– les ouvertures, dont les fenêtres rectangulaires à carreaux (certaines groupées par trois, ou inscrites sous un arc surbaissé), les lucarnes à croupe (certaines de grandes dimensions et disposées de façon opposée l’une à l’autre), les portes (certaines surmontées d’une imposte et encadrées de baies latérales et l’une d’entre elles à double vantail)
– l’ornementation sobre, constituée principalement des consoles ouvragées supportant les avant-toits
– les souches de cheminées.

Informations historiques

La gare du CP est située à Sherbrooke, une ville dont la croissance est marquée par le chemin de fer. Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, Sherbrooke devient le noeud d’un réseau de lignes ferroviaires qui connecte la région des Cantons-de-l’Est aux grands centres nord-américains. Ainsi, ces voies de communication ouvrent la ville aux marchés canadiens et américains. Cette situation révolutionne l’industrie et le commerce de la région. Dans les premiers temps, les lignes des différentes compagnies aboutissent à une gare située dans la partie basse de la ville. Sherbrooke s’impose bientôt comme centre régional.

La compagnie du Canadien Pacifique accède à Sherbrooke et sa région à la fin des années 1880 avec l’achat de deux lignes, l’International Railway et la Waterloo and Magog Railway. Une gare ouverte en haute-ville en 1890 dessert les manufactures implantées à sa proximité. La construction d’une nouvelle gare s’avère nécessaire au début du XXe siècle, car la compagnie voit son trafic transcontinental augmenter considérablement. Le Canadien Pacifique fait du site de Sherbrooke son point divisionnaire, ce qui nécessite une gare, une cour de triage et des entrepôts pour les marchandises. La nouvelle gare est attribuée aux architectes Wilfrid Grégoire (1880-1955) et Louis-Napoléon Audet (1881-1971). Les travaux sont réalisés par les entrepreneurs Simoneau et Dion. La construction, de plan rectangulaire d’une élévation d’un étage, est coiffée d’un toit à croupes. La façade est ponctuée d’un pavillon de deux étages. Le bâtiment est prolongé de deux espaces extérieurs couverts à chaque extrémité. Les nouvelles installations ferroviaires entraînent une expansion du secteur industriel de l’ouest de la ville. Des quartiers résidentiels apparaissent autour de cette zone, des commerces et des services s’implantent aussi pour répondre à la nouvelle clientèle.

En 1913, l’ensemble du réseau du Quebec Central Railway est loué par le Canadien Pacifique. Le Quebec Central demeure toutefois une entité distincte et utilise pendant encore quelques années les infrastructures du Grand Tronc situées dans la partie basse de la ville. La gare du CP est agrandie en 1920 par l’ajout d’une annexe d’un étage et demi à l’extrémité du passage extérieur couvert situé du côté est. En 1927, le déménagement des activités du Quebec Central à la gare du CP entraîne des modifications au bâtiment. Le passage extérieur couvert à l’est est remplacé par une construction qui relie l’annexe de 1920 au bâtiment initial. Une extension d’un étage et demi est aussi ajoutée du côté ouest. La gare fait l’objet d’un dernier agrandissement du côté ouest vers le milieu du XXe siècle. Il en résulte un allongement important du bâtiment.

Le transport ferroviaire perd de l’importance dans les décennies suivantes au profit du transport routier. En 1981, le Canadien Pacifique arrête son service de transport de passagers à la gare de Sherbrooke et transforme par la suite cette dernière en bureaux. La compagnie demande l’autorisation d’enlever la gare en 1992. Cette dernière est désignée gare patrimoniale l’année suivante en vertu de la Loi sur la protection des gares ferroviaires patrimoniales. Le Canadien Pacifique cesse le transport des marchandises en 1994. La gare est laissée à l’abandon pendant plus d’une dizaine d’années et son état se dégrade. La Ville de Sherbrooke acquiert le bâtiment en 2002. 

La gare du CP est citée en 2005. Dans le cadre du projet de réaménagement urbain Cité des Rivières, d’importants travaux de restauration et de rénovation sont effectués en 2006 et 2007. L’édifice est converti en marché public et devient aussi le point de départ et d’arrivée du train touristique Orford Express. Le secteur entourant la gare est réaménagé à des fins récréotouristiques et résidentielles.

Source : Répertoire du patrimoine culturel du Québec

Photos : Monique Bellemare