Montréal

Gare Viger

Description

Les limites de ce qui reste du complexe ferroviaire de la Place Viger, dont les activités ferroviaires se sont déroulées entre 1883 et 1951, se situent à la frontière est de l’arrondissement historique du Vieux-Montréal, entre les rues Saint-Hubert, Berri et Saint-Antoine, et de part et d’autres du viaduc de la rue Notre-Dame. En raison des récents développements dans le secteur, il est difficile de mesurer de nos jours l’ampleur que l’emprise ferroviaire a déjà eue. À son apogée, ses installations s’étendaient des rues Berri à Beaudry entre la rue Saint-Antoine et le fleuve Saint-Laurent. 

L’ensemble, construit par le Canadien Pacifique entre 1883 et 1911, se compose de nos jours de trois anciens terminus distincts : la gare Dalhousie (1883-1884), la gare-hôtel Viger (1896-1898) et son annexe, la gare de la rue Berri (1910-1911).

La gare-hôtel Viger se distingue du lot par son style « châteaux de la Loire », caractérisée par ses nombreuses tourelles d’angle en poivrière, son toit à croupes prononcées et brisées et ses éléments de cuivre. Construit en pierre grise de Montréal et en brique orange d’Écosse, le bâtiment est constitué d’un corps central, parallèle à la rue Saint-Antoine, et de deux ailes latérales légèrement différentes l’une de l’autre, formant un plan en « U ». La façade principale est animée par la présence de deux avants-corps rectangulaires situés dans le prolongement des ailes latérales et d’un avant-corps central se prolongeant dans une tour. Une grande arcade, aujourd’hui presque toutes transformées en fenêtres, bordent tout le rez-de-chaussée alors que les très nombreuses fenêtres des cinq étages supérieurs traduisent l’ancienne vocation hôtelière de l’édifice. 

L’ensemble comprend aussi, le viaduc de la rue Notre-Dame, érigé en raison de la présence du chemin de fer, mais refait à neuf dans les années 1990. Sa présence nous rappelle que d’importantes excavations ont été faites pour implanter les installations ferroviaires et qui ont eu pour effet d’uniformiser la topographie du site au niveau de la rue de la Commune. D’ailleurs, l’irrégularité du mur en pierre de la gare Dalhousie, sous le viaduc Notre-Dame, témoigne qu’il s’appuyait autrefois sur le coteau de la rue Notre-Dame, alors le sommet le plus élevé du site. Les portes qui percent ce mur rappellent que l’espace sous le viaduc avait été récupéré pour y bâtir une annexe. Il subsiste des vestiges de mur de maçonnerie du viaduc initial sous celui actuel.

Informations historiques

En 1881, le chemin de fer du Canadien Pacifique (CP) est fondé dans le but rallier l’ouest du pays par voie ferrée. Montréal, alors métropole canadienne, est choisie pour être son terminus est. La gare Dalhousie, premier terminus montréalais de prestige, est achevée en 1884, selon les plans de l’architecte Thomas C. Sorby. Le 28 juin 1886, le premier train transcontinental de l’histoire du Canada quitte la gare. 

Alors peu fortunée, la compagnie priorise le transport de marchandises, plus lucratif et développe son site entre 1883 et 1887 dans ce but, avec la construction de hangars à fret et des premiers silos du port (A et B). Ces derniers seront remplacés au début du XXe siècle par les silos no 1 et 2. Il s’agit du seul complexe ferroviaire avec terminus à avoir un lien direct avec le port. 

Afin de faire revenir le trafic transcontinental de passagers, détourné à la gare Windsor (CP), la Ville offre au CP, en 1893, un site pour une nouvelle gare. Cet agrandissement du complexe coïncide avec la volonté de la compagnie ferroviaire d’améliorer ses services aux voyageurs, de développer une chaîne hôtelière et de doubler la capacité de ses installations liées au trafic de marchandises. C’est l’architecte Bruce Price qui réalise les plans de la gare-hôtel Viger. Le bâtiment est fastueux et traduit l’ascension économique du CP. La première section viaduc de la rue Notre-Dame est érigée à cette époque afin de laisser passer les trains de passagers et de conserver cet important axe de circulation. La gare Viger accueille ses premiers trains le 16 août 1898. Entre temps, la gare Dalhousie est recyclée en édifice à bureaux et en entrepôt à peine 14 ans après son inauguration.

Tandis que la gare Viger est convertie en hôtel entre 1912 et 1913, le viaduc de la rue Notre-Dame est prolongé jusqu’à la rue Beaudry et des entrepôts sont érigés sous lui. Au final, près d’une cinquantaine de voies occupent le complexe, d’une capacité totale de 1 108 wagons, dont 900 uniquement pour le transport des marchandises.

C’est également en 1935, que la gare-hôtel Viger ferme ses portes. Il est occupé de 1939 à 1950 par différents services de l’armée canadienne. En 1950, la Ville achète les gares Viger et Berri et les transforme ensuite en édifice à bureaux. Le transport de marchandises persiste toutefois autour des hangars à fret. Dans les années 1980, les traces de l’activité ferroviaire ont presque toutes disparues. 

Source : Répertoire du patrimoine culturel du Québec

Photos : Gérald Arbour